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Le froid de l'Europe nuit aux vignobles de Bordeaux, en France

Le froid de l'Europe nuit aux vignobles de Bordeaux, en France

Avril 26, 2024

Lorsqu'un coup de froid sévère et non saisonnier s'est abattu sur les vignobles bordelais fin avril, les vignerons sont entrés en action. Ils ont mis le feu à des milliers de barils de pétrole, les positionnant soigneusement entre les rangées de vignes en herbe dans le sud-ouest de la France. Des ventilateurs géants ont été déployés pour combattre l'air froid et humide qui se déposait sur les plantes.

Les hélicoptères ont également volé à basse altitude, dans une autre tentative extravagante de combattre la condensation gelée. Au lendemain du pire gel de fin de saison de la région depuis plus de deux décennies, les vignerons attendent avec impatience la phase cruciale de floraison de juin, lorsque la pollinisation aura lieu.


Vignes ratatinées

Le gel a laissé un sombre paysage. «Nous avons une gueule de bois. Quatre-vingt pour cent de notre vignoble a été touché par le gel. C'est tout notre travail qui a été anéanti », explique Jean-François Galhaud, président du Conseil viticole de Saint-Emilion qui représente près de 1000 vignerons, debout devant des rangées de vignes Merlot aux feuilles recourbées et racornies.

Le froid glacial a frappé deux fois en une semaine le mois dernier, ravageant les pousses et les bourgeons fragiles qui avaient émergé prématurément à la suite des températures douces de mars. Cela signifie de mauvaises récoltes non seulement pour les raisins mais aussi pour les fruits et légumes comme les pommes, les poires et les asperges.

Les producteurs de vin affirment n'avoir pas connu un gel aussi dommageable depuis 1991 lorsque plus de la moitié des vignobles de la région bordelaise ont été touchés. François Despagne, qui produit le Grand cru Saint-Emilion Château Grand Corbin-Despagne, dit que 90% de son vignoble a été endommagé par le froid, plus qu'il n'en a vu en 20 ans dans l'entreprise.


Les dommages causés par les intempéries ont été ressentis dans toute la France et dans d'autres parties de l'Europe aussi. En Allemagne, le gel a touché tous les vignobles du pays, ce qui est «extrêmement rare», explique Ernst Buescher, de l'Institut allemand du vin.

Dans la région italienne de Toscane, 20% de la production de vin a été détruite, évaluée à environ 90 millions de dollars (environ 80 millions d'euros), selon l'association agricole Confagricoltura.

Vignes fleuries de juin

La qualité des raisins de cette année dépend de la floraison de juin, explique Stéphane Toutoundji, œnologue basé dans la ville de Libourne, au sud-ouest, qui conseille les vignerons de Bordeaux.


Si les bourgeons ne parviennent pas à reprendre leur croissance d'ici le mois prochain, la récolte annuelle sera réduite de moitié en volume pour Bordeaux, pour un chiffre d'affaires estimé à 1,5 milliard d'euros, estime le CIVB, une association viticole de la région. , la récolte de cette année sera tardive.

«Croisons les doigts pour faire une 1961, une année avec une petite récolte de très bonne qualité», raconte Galhaud. Cependant, Toutoundji dit que ce qui a survécu au gel n'est que de «qualité normale».

Dommages à long terme?

Pour survivre à cette mauvaise passe, une aide aux vignerons est disponible sous forme d'allocations de chômage partiel, d'aides sociales et de soutien financier des collectivités locales.

Seule une faible proportion, 15%, des 800 000 hectares de vignobles de la France est assurée, principalement en raison du coût élevé des assurances.

L'abondante récolte de l'année dernière dans la région contribuera à combler certaines des lacunes de cette année, grâce à un programme appelé VCI, par lequel les régulateurs permettent aux vignerons de conserver les quantités approuvées de stocks de vin d'une année précédente en cas de catastrophes naturelles.

Mais malgré le dispositif VCI, la production de Bordeaux devrait atteindre 3 millions d'hectolitres cette année, bien en deçà d'une production annuelle moyenne de 5,4 millions d'hectolitres.

Les quotas VCI n'aident cependant pas les producteurs qui vendent leur vin en vrac et ne disposent pas de stocks pour atténuer ces pénuries.

Ajoute aux défis

Les vignerons bordelais se sont rétablis avec trois bons millésimes après avoir connu une mauvaise année en 2013, ce qui a rendu le coup d’avril encore plus difficile.

Malgré les diverses mesures de secours à court terme, les dommages causés par les conditions météorologiques mettent à nu d'autres grands défis auxquels sont confrontés les vignerons.

Les producteurs du sud de la France sont frustrés par une augmentation du vin espagnol en vrac bon marché, qui a déclenché plusieurs manifestations dans les supermarchés ces derniers mois.

Il y a aussi de la concurrence de plus loin. Laetitia Ouspointour, du Château Vieux Mougnac à Lussac, craint que la région ne perde des parts de marché au profit de pays comme l'Australie et l'Afrique du Sud. L'augmentation des coûts de production ajoute au défi, dit-elle. «Nous ne serons pas en mesure de fournir du vin, et cela coûtera plus cher que les autres vins», explique Ouspointour.


Des terroirs, des châteaux et des vignes - Émission intégrale (Avril 2024).


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